Cet arrêt concerne une servitude d'empiétement relative à deux parcelles, n°10915 et n°10916, situées dans la commune de Y, sur lesquelles se trouvent un chalet. La procédure oppose A., héritier et propriétaire de la parcelle n°10915, aux héritiers de J., propriétaire de la parcelle n°10916. En 1997, J., qui avait hérité de la parcelle 10916 comprenant une partie de ce chalet, a effectué des travaux de transformation sur ce dernier, modifiant notamment l'accès et l'aménagement des combles situés en partie sur la parcelle 10915. A. a contesté cet empiétement et a intenté une action en justice.Le Tribunal de première instance a reconnu l'existence d'une servitude d'empiétement en faveur de la parcelle 10916. Après avoir vu son recours rejeté au niveau cantonal, A. a formé un recours au Tribunal fédéral, demandant la suppression de l'empiétement et la rectification des limites de propriété.
L'empiétement d'une construction sur le fonds d'autrui consiste en une mise à contribution illicite dudit fonds ; il suppose une construction érigée en partie dans les limites horizontales ou verticales de celui-ci et en partie sur la parcelle du constructeur, un lien technique et fonctionnel devant exister entre ces différents éléments de construction. En exerçant l'action négatoire de l'art. 641 al. 2 CC, le propriétaire lésé peut, en principe, exiger la suppression matérielle de la partie de la construction qui constitue l'empiétement. Cette prérogative est limitée par l’art. 674 al. 3 CC qui permet, au constructeur, à certaines conditions (cumulatives) d'obtenir du juge l'attribution d'une servitude d'empiétement contre paiement d'une indemnité équitable.
Ainsi, lorsque le propriétaire lésé, après avoir eu connaissance de l'empiétement, ne s'y est pas opposé en temps utile – soit dès qu'il est en mesure de le faire et que la violation des règles du droit de voisinage est objectivement reconnaissable – (1ère condition), l'auteur des constructions et autres ouvrages peut demander, s'il est de bonne foi – la bonne foi étant présumée (art. 3 al. 1 CC) – (2ème condition) et si les circonstances le permettent (3ème condition), que l'empiétement lui soit attribué à titre de droit réel contre paiement d'une indemnité équitable - celle-ci n'étant cependant pas une condition de l'existence du droit attribué par le tribunal. Pour décider si l'attribution est justifiée par les circonstances, le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation, lequel repose sur une pesée des intérêts en présence. Celle-ci doit tenir compte de la facilité ou de la difficulté de supprimer l'empiétement, de sa durée, de l'intensité de la dépréciation subie par le fonds objet de l'empiétement et de l'utilisation faite de la construction.
Selon le Tribunal fédéral, les transformations effectuées par J. entre 1997 et 1998 constituent des ouvrages entrant dans la sphère d'application de l'art. 674 al. 3 CC, cette disposition visant toutes les formes de constructions au sens de l'art. 667 al. 2 CC. Le Tribunal fédéral considère également, que c’est à juste titre que l'autorité́ cantonale, a retenu que l'aménagement litigieux empiétait sur la parcelle appartenant au recourant.
En l’espèce, les conditions de l’art. 674 al. 3 CC, la bonne foi de J. doit être considérée acquise (première condition), alors que la deuxième et la troisième condition ne sont pas remplies. Le Tribunal fédéral rejette également l’argumentation du recourant relative à l’art. 675 al. 2 CC et confirme ainsi l'inscription de la servitude au registre foncier.